Les livres sont des
histoires.
Les livres ont des
histoires.
Les livres sont des
personnes.
Il circule sur
Facebook un jeu où il faut faire la liste des 10 livres qui nous ont marqués.
Je n'ai pas été nommée, je le fais quand même. Et en prime, je raconte
l'histoire ou la personne qu'est ce livre.
Ce livre, c'est une
époque pour moi. Mes années d'université. J'avais un amant. Un soir, il allait
partir sans demander son reste. Comme il mettait son manteau, ce livre est
tombé de sa poche. J'en avais entendu parler, jamais lu. Il trouvait ça étrange
et ridicule que je ne l'aie jamais lu. Il faut savoir que cet homme ne donnait
pas l'impression d'être un homme "à lire". Il s'est assis sur le bord
du lit, alors que je restais sous les draps. Il a lu la première page. Je l'ai
supplié du regard de continuer. Et il est resté.
Chaque fois qu'il
venait, après nos étreintes, il me faisait la lecture. Souvenir impérissable
dans ma vie. Sa voix chaude me racontait l'histoire de Benjamin
Malaussènes et de sa Clara-Clarinette.
Je m'endormais parfois. Il arrêtait, se rhabillait et je me réveillais en
sursaut. Quelques nuits, je l'ai gardé auprès de moi jusqu'au levé du soleil
grâce à ce livre. Après, ce fût la Petite Marchande de prose et la Fée
Carabine. Je les lisais le jour, sans lui dire, et il venait me les raconter la
nuit.
Mon voyage à Paris fût
à la saveur de cette série.
Je ne veux pas voir le
film…
2. Le Zubial d’Alexandre
Jardin
Un jour, la curiosité
de mes 12 ans a trouvé un roman sur la table de chevet de mon père.
Bille-en-tête. C'est pas un roman pour toi! On essaya de combler cette curiosité
malsaine par un Rouletabille chez le Tsar. Gaston Leroux. Livre de poche usé et
peu séduisant.
Une nuit, j'ai volé le
dit roman. Et pour pouvoir le remettre en place et ne pas devoir le voler
encore, je l'ai lu en une nuit. Je venais de faire connaissance avec Jardin.
J'ai tout lu avidement de lui. Mon adolescence se trouvait charmée par son
romantisme vieillot. Mais pour mes 18 ans, j'ai fait la connaissance du Zubial.
Tout-à-coup, cette folie cachée en moi pouvait s'écrire. Il m'en a donné le
droit. Mes histoires cachées dans mes cahiers avaient droit de vivre.
3. Trilogie du Bonheur
Marie Laberge
Notre vieil
appartement de la rue DeLorimier abrite le souvenir de leurs lectures. Trois
briques que j'ai englouties. Je lisais jour et nuit, pendant mes pauses au
travail. J'ai cessé d'étudier. J´ai failli mourir 10 fois, échappant de
justesse à une voiture ignorée, un wagon de métro absent, un parcomètre mangé
en plein front.
Je suis devenue asociale,
remerciant pour l'invitation, mais j'avais vraiment trop d'étude.
J'ai pleuré, sangloté
comme un bébé pendant une nuit entière à la mort de Nicolas. Je ne suis pas
certaine de m'en être tout-à-fait remise. Mais surtout, je n'avais pas prévu
terminer le volume si tôt et je me retrouvais seule jusqu'à l'ouverture de la
librairie.
4. La grosse femme d'à
côté est enceinte Michel Tremblay
Secondaire 5, option
théâtre, je joue, dans un collage de Tremblay. Dans ce même spectacle, je
découvre aussi Becket quelques autres auteurs de théâtre. Je ne connais pas
l'univers de Tremblay. Je comprends donc mal les indications du metteur en
scène. Mon professeur est un homme gay très sympathique que j'aime beaucoup et
qui a une immense patience avec mon ignorance.
Il emprunte pour moi à
la bibliothèque, le premier maillon d'une chaîne... La première histoire des
Chroniques du Plateau. C'est là que j'ai découvert la force de l'imaginaire et
qu'il pouvait cohabiter facilement avec le réel.
5. Ensemble c'est
tout! Anna Gavalda
Pas d'époque en
particulier. Un livre placé entre mes mains presque par accident. Il a pris la
poussière pendant de longs mois sur ma table de chevet avant que je n'ose
l'ouvrir. J'ai lu la première phrase. Tout se joue là. Si j'aime la première
phrase, j'aimerai le roman. Si je n'aime pas, gageons que l'histoire n'aura
jamais de fin.
Une histoire toute
simple d'amour. Mais je me souviens par-dessus tout de l'état de transe dans
lequel je me suis retrouvée pendant des jours durant après l'avoir terminé. Le
film m'a bien déçu... Audrey Tautou si adorable soit-elle.
6. La nuit des temps
René Barjavel
Je n'aime pas la
science fiction. Enfin, pas trop. Alors j'évite. Mais les garçons fréquentés
dans ma jeune vie d'adulte en étaient friands. Alors quand il m'a prêté ce
bouquin, j'ai mimé l'intérêt. J'aurais pu faire comme pour tous les autres
livres qu'on m'a supplié de lire parce que ça manquait tellement à ma culture,
c'est-à-dire lire les premières pages, la fin et apprendre par cœur le résumé
de la 4ème de couverture. Désolée les gars!
Mais contrairement aux
autres, il n'avait pas insisté. Comme je tenais beaucoup à lui et qu'il était
immensément difficile à cerner, j'ai pensé que je découvrirais un peu de lui
entre les chapitres.
J'ai mis un temps fou
à le lire! Et quand je lui ai enfin annoncé que je l'avais terminé:
- Alors?
- C'était bon!
- Ouais...
Et je ne lui mentais
pas. J'ai aimé le livre. Pour de vrai! Je ne lui ai jamais rendu! Comme
d'habitude! D'ailleurs, ne me prêtez JAMAIS un livre auquel vous tenez. Un
conseil comme ça. Barjavel traîne toujours dans ma bibliothèque et a survécu
aux purges ménagères. Il a eu pour effet aussi de m'attirer quelques
commentaires: "Tu as lu ça toi! J'aurais pas cru!" Ouais, j'ai lu et
j'ai aimé!
7. Harry Potter J.K.
Rolling
Il paraît que ma mère
lisait. Mais j'ai pas de souvenirs d'elle avec un livre dans les mains. Un soir
de ma jeune vingtaine, je lui téléphone. Elle a l'air agacé et me répond par
monosyllabe. Je regarde l'heure, me demandant si je ne manquais pas un truc à
la TV.
- Tu étais couchée? Je
te dérange?
- …
- Harry Potter! Tu
connais pas? Je suis dans le 2ème livre.
Je savais que c'était
un roman jeunesse, mais je ne comprenais pas son intérêt. Elle qui ne lisait
pas de roman... Elle m'a offert le premier pour Noël... Et moi les autres les Noëls suivants.
À l’accouchement de
Gaëlle, entre deux contractions, je réclamais mon livre…
8. Le journal de Bridgt
Jones Helen Fielding
J’ai fait parti de la
première vague de Blog d’humeur au Québec. À l’époque, on avait reçu le nom de
«Diariste». On disait, de façon extrêmement réductrice, qu’on publiait notre
journal intime sur le Web. Mais ce qui était le plus intéressant dans toute
cette époque, c’est les rencontres que j’y ai faites. Certains «Diaristes» sont
encore mes amis. Je suis en contact avec certains autres via Facebook.
Il n’était pas super
difficile de faire le lien entre mon «Diary» et le roman qui nous occupe. Une
célibataire rondelette qui cherchait l’amour et allait se fourrer là où l’homo-érectus
pouvait abuser d’elle.
Elle avait vu juste. La
Brume avait reconnu des similitudes entre le personnage et moi. Roman léger, un
des premiers Bestseller de Chick lit, j’avais sauté à pieds joints dans le
genre. Comme c’était supposé, j’étais le public cible et la cible était
atteinte. J’ai lu ce roman plusieurs fois. Puis le second «L’âge de raison». J’avais
lu ce roman comme si je lisais une grande saga.
L’histoire ne dit pas
si Bridget a eu 3 enfants et roucoule encore avec Mark Darcy…
Puis les films que je
revois encore chaque année…
9. Odette Toutlemonde
Éric-Emmanuel Schmitt
C’est ma première
rencontre avec cet auteur. J’avais vu l’affiche sur les murs du cinéma.
Catherine Frot lévite littéralement dans le métro, un livre à la main. Partout,
on spécifie que c’est tiré de la merveilleuse nouvelle D’Éric-Emmanuel Schmit…
Connais pas! Comme tout le monde le dit toujours «C’était bien, mais le livre
est meilleur!» J’ai dû attendre Noël pour qu’il soit déposé dans mon bas de
Noël. J’ai commencé par la première nouvelle. Ce fût comme gravir une montagne.
Chaque nouvelle était plus complexe, difficile et géniale que la précédente… Malheureusement,
Odette Toutlemonde n’a pas livré l’extase espérée. Encore moins le film. Mais
grâce à cette nouvelle, j’ai fait la rencontre d’un auteur. Puis, il y eu Oscar
et la dame rose. Et depuis, on ne s’est plus quitté.
10. Volkswagen blues
Jacques Poulin
Le premier droit du
lecteur selon Pennac, est celui de ne pas lire. J’adore lire. Mais force-moi à
le faire, de grandes chances que tu frappes un mur. Mes notes en français au
CEGEP peuvent t’en parler en masse. D’ailleurs, je n’arrive pas à comprendre
comment j’ai eu mon diplôme en ne lisant que la 4e de couverture et
en frôlant la couverture au fond de mon sac par accident.
Croyez-le ou non, nous
avions La Modification de Michel Butor à lire. C’était au programme depuis le
début de la session. Un lundi matin, je me pointe à mon cours et je vois tout
le monde sortir le livre… Mauvais présage… Je vais voir la prof, une vieille
mémère qui sentait mauvais. J’ai demandé ce que nous avions au programme :
Examen de lecture sur le roman ci-haut mentionné.
J’ai réussi à faire
avaler à la mémère que j’avais cru qu’elle allait «modifier» le roman à l’étude…
Et elle ma crue… Elle m’a proposé de me présenter la semaine suivante à son
bureau pour m’interroger oralement… Non! C’est beau, ça va… J’ai couru à la
COOP du Collège acheter le roman sur ma carte de crédit et j’ai fait l’examen…
Je l’ai réussi. Bon, j’ai eu la note de passage tout juste… Mais tout de même.
. Volkswagen blues
était à l’étude du cours «Littérature Québécoise». Je croyais que j’allais
trouver une motivation supplémentaire… C’était sous-estimer ma rébellion de la
lecture imposée. Je voyais l’examen arriver et je n’avais pas terminé le
premier chapitre. Bang! Mon ex amoureux me lance par la tête d’arrêter d’espérer…
Il ne reviendra pas! Je pleure ma vie, roulée en boule dans ma couette… Ma
petite télévision noire et blanc à roulette crachait les nouvelles et j’avais
pas le courage de me lever pour changer le poste.
Je ne rêve que de
partir… Loin, très loin, disparaître. Pourtant, je n’arrive pas à quitter mon
lit… Le chat, sautant de la table de chevet au lit fait tomber le roman de chez
Québec/Amérique sur mon lit… Je tourne les pages machinalement sans faire
attention. Mes yeux se posent sur une description du moment où il rencontre la
fille dans un garage miteux. (J’espère que je ne me trompe pas de roman).
J’ai lu toute la nuit.
Vers 4h00, je n’avais plus de peau sous les yeux pour pleurer. J’ai recommencé
le livre… À 8h30, j’étais assise en classe et je répondais aux questions comme
si j’avais écrit le roman moi-même.
* * *
Au moment de mettre ce texte en ligne, quelqu’un n’a pas résisté à me
défier en duel! ;-) Voilà Marie-Ange!
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