Le coeur au beurre noir...

Encore une grosse colère! Je reconnais mon bébé qui a passé 4 mois à hurler 20h00 par jour. Je reconnais le bébé que j’ai eu envie de laisser sur le perron d’une église et de remonter en voiture arrêté à un feu rouge. Le bébé que je n’arrivais pas à aimer parce qu’elle me renvoyait à ma médiocrité de mère. Le bébé qui hurlait et que je n’arrivais pas à consoler.


Mais elle allait mieux… Elle est devenue une enfant agréable! Elle avait un fort caractère, mais ça finissait par passer. Et en quelques minutes, elle retrouvait son sourire et sa joie de vivre. Ça nous consolait, même on recommençait le manège 12 fois par jour… Toutes les heures de la journée.
Puis 6 fois par jour, puis 4, puis nous nous sommes mis à compter en jour. On a arrêté de devoir la prendre dans nos bras pour lui éviter de se fendre la tête en se la fracassant sur le sol ou sur le mur. J’ai accusé plus que mon lot de coups de tête, plus que mot lot de morçures avec un seul enfant. Mais depuis qu’elle avait commencé l’école, on respirait. Ce n’était pas parfait, mais c’était vivable.


Mais depuis quelques semaines, c’est revenu. De la torture psychologique. Elle hurle, me dit des choses tellement blessantes. J’ai beau me répéter que c’est moi l’adulte et que c’est à moi à gérer la situation, je commence à être au bout de ma corde. J’ai mal à toutes mes fibres… J’ai des images dans la tête qu’une mère ne devrait jamais avoir. J’ai beau appliquer toutes les techniques éducatives rigoureusement, c’est toujours moi qui me mange une giffle en pleine figure.
Parfois, je me dis: “ Avec ma mère, on ne s’en serait jamais rendu là… J’aurais reçu une giffle bien avant!” Mais j’ai décidé que dans ma maison, la colère et les disputes se règleraient bien autrement qu’en administrant des giffles ou des fessées. Mais j’ai épuisée mon lot de possibilités. J’ai l’image de ma main qui se donne un élan et qui claque… Mais je ne le fais pas… Elle a reçu une toute petite fessée aujourd’hui… Rien de méchant, ça n’a même pas rougie. Mais j’ai eu honte.


J’espérais que de venir m’asseoir seule pour écrire me ferait du bien, mais il n’y a rien à faire. Même si elle a quitté la pièce, agacée par mon silence, j’ai toujours ce bruit de claque dans mes oreilles… J’en rêve. Je sais que ça doit être malaisant pour celui qui me lit. Je sais que vous n’aimerai pas être témoin de ma confession… Mais je préfère raconter ce qui m’habite, que le laisser me ronger ou passer aux actes…


Aujourd’hui, je SUIS dans la médiocrité. Je ne suis plus capable de supporter son ton, ses hurlements. J’aurais envie de fuir, de m’en aller. Je lui ai dit de me laisser tranquille, de rester dans sa chambre. Mais qu’obtient-on du boudin quand la personne dont on veut obtenir quelque chose n’est pas là pour en être témoin? 10 fois que je suis allée la reconduire dans sa chambre en lui disant qu’elle en ressortirait quand JE ME serais calmé… La 10ème fois, j’ai écopé d’un coup de pied dans les côtes…


Je me mets une paire d’écouteur dans les oreilles et j’essaie de l’ignorer… Mais la boule au ventre ne me quitte pas. Et elle croit que parce que je l’ignore, ça l’autorise maintenant à laver les cheveux de sa poupée dans lévier de la cuisine.  Mais si je me lève et que je lui enlève sa poupée, qu’est-ce qui va se passer? Est-ce que la main va partir? Alors je la reprends par la main et la ramène dans sa chambre. J’ai fermé les oreilles et j’ai essayé de ne rien faire.


Je me tappoche le coeur, je l’aime, mais c’est mon propre coeur qui se fait tappoché.


L’histoire se termine qu’elle virevolte dans le salon. Elle veut que je vienne voir sa chambre. Elle a changé le lit de côté et s’est fabriqué un petit coin doux. Elle en est tout heureuse! Mais je n’arrive pas à mettre mon coeur au beurre noir de côté. Cette fois, je ne tourne pas la tête. Si je me lève, je n’arriverai pas à sourire et à la félicité. Elle va penser que ça ne me fait pas plaisir. Je voudrais disparaître un peu. Avoir le coeur anesthésié.


Entre ces lignes, il y a eu la préparation du repas, un petit conseil de famille réclamé par les enfants, papa qui impose une conséquence, accepté raisonnablement. Tic tac de l’horloge, vient l’heure dite.


Oui maman! J’y vais maman… Mais… Mais… Est-ce que je peux? Mes yeux tournés silencieusement vers elle. Mais maman! Tu ne comprends pas.


Mon coeur n’aura pas su se remettre qu’il faudra remonter dans le ring…

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