Prêt pas prêt, j’y vais !

Cette semaine, je vais franchir un cap. Je sais, tout le monde s’acharne à me dire que c’est juste un chiffre. Un chiffre qui tourne et qui ne change pas hier et qui aura probablement peu d’impact sur demain. La vie continuera.

Mais contrairement aux autres chiffres, j’ai la profonde conviction et ce, depuis longtemps, que je mets le pied dans un nouvel air.
Je n’attends pas que « la vie » se charge de me faire virer sur un 10 cents. Mais j’ai comme la profonde impression que je vais devoir moi-même initier le mouvement si je ne veux pas prendre le champ. La route tourne et si je ne veux pas passer le reste de ma vie sur la voie de service, je vais devoir moi-même tourner le volant et adopter une vitesse de croisière.
Ça fait 3 ans que je me prépare à cela. Ça fait trois ans que je mets la table pour pouvoir reprendre l’autoroute. Il y a bien quelques trucs dont je me serais passé, mais dans l’ensemble… Et à la toute veille, je ne suis pas tout-à-fait certaine de ce que je vais devoir faire pour y arriver.  

 * * *

Je vais devenir grande… Ça fait 20 ans qu’on me répète que de devenir une adulte, c’est assumer. Pas prendre des RÉER, pas conduire une voiture, pas payer son hypothèque. Assumer. Assumer ce que l’on dit, assumer ce que l’ont fait.
Bien que les débuts aient été caotique, je dois avouer que j’ai pas trop mal réussi sur ce plan là.
Assumer les sacrifices de faire des études, assumer de vivre dans l’incertitude un bon nombre d’année. Assumer d’avoir quand même des enfants à travers cela. Assumer d’en avoir trois au lieu de deux. Assumer de vivre dans une maison trop petite, mais une maison à moi quand même.
J’ai pas mal assumer. Et depuis tout ce temps, j’ai figuré que c’était ÇA assumer. Faire les sacrifices nécessaires pour mener ma vie et celle de ma famille vers quelque chose de mieux. Être là, au poste, lorsqu’on a dit qu’on le serait. S’engager dans des projets plus ou moins réalistes parce qu’à la base, l’idée était bonne, mais ce n’était pas le chemin qu’on vous avait expliqué au départ. Et lorsque c’est trop difficile, je recule dans l’ombre en serrant des dents, espérant qu’on m’oublie.
Et depuis 3 ans, je me demande si c’est vraiment ça assumer ? Est-ce vraiment ça devenir une adulte ? Assurer présence, soutien et amour inconditionnel au nom de son engagement ?
* * *
Cette semaine, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai dit à quelqu’un : « J’ai changé d’idée… Tu ne pourras pas compter sur moi. Je sais ! J’avais dit que tu pouvais, mais ça ne sera pas possible. »
En temps normal, j’aurais initié une partie de cache-chache. Parfois, c’est toi qui aurait compter et moi j’aurais couru le plus loin possible sans me retourner. J’aurais trouvé le petit coin noir et j’aurais souhaité fort fort fort que tu ne me retrouves pas.
Mais habituellement, je m’organise pour compter. Et encore-là, je cours le plus loin possible. Pis quand tu me l’aurais reproché, je t’aurais menti en te disant que ta cachette était trop bonne, que je suis vraiment désolée que tu m’aies attendu jusqu’à la nuit…
Alors imaginez ma surprise quand je me suis entendue dire « Je suis désolée ! Mais tu vas devoir jouer à la tague avec quelqu’un d’autre que moi ! » Je ne me suis pas justifié. J’ai juste dit « La tague, c’est pas pour moi… L’idée paraissait bonne au départ, mais tu ne peux plus compter sur moi. »
Ça peut paraître banal comme ça, mais je suis encore toute abasourdie. J’ai été capable de le dire sans insomnie, sans angoisses paralysantes. Juste ce qui en est.
Dans un conte pour enfant, l’histoire aurait fini par un « Sans rancune ! Je comprends… » C’est pas tout à fait ça qui est arrivé. Tu m’en veux un peu. D’abord parce que je ne serai pas là, alors que je t’avais dit que tu pouvais compter sur moi. Je sais… C’est moche. C’est sûr que je n’ai pas choisi un question de vie ou de mort. Mais quand même. Mais tu es aussi fâché parce j’ai osé te dire la vérité. Pis en plus, j’ai pas essayé de minimiser…

Alors j’ai pas joué à cache-cache.  
Et je n'ai jamais eu l'impression de plus assumer que ce jour-là... 

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