J'ai vu traîner Au bonheur des Ogres et La Fée Carabine sur la bibliothèque de mon père à l'adolescence. Comme ça... J'avais été attiré par les titre, par les images bizarres sur la page couverture. Mais à 14 ans, tout ce qui vient des adultes nous répugne un peu.
Puis... Il s'appelait Frédéric. La bête pour les intimes...C'était mon amant. Il venait cogner à ma porte tard le soir. Parfois je dormais déjà. Il empruntait la camionnette de ses parents, la stationnait en arrière, escaladait l'escalier de métal qui menait à une porte dans ma chambre. Il repartait généralement quelques heures après, je m'étais généralement rendormie. C'était un type un peu bourru, soudeur de métier, pleins de tattoos. Nos conversations n'étaient pas essentielles. Nous n'avions jamais investi cet aspect-là.
Un soir, il m'avait appelé du centre-ville. Sa soirée l'emmerdait et avait envie de me voir. Il était débarqué avec le dernier métro sous une pluie assassine. Après quelques temps, je me suis lovée contre lui. J'ai constaté que la pluie était aussi agressive qu'à son arrivée...
- Tu veux dormir ici? Il pleut... Et y'a plus de métro.
On ne faisait pas ça nous... On ne dormait pas ensemble. Il a hésité quelques secondes...
- Ouain... Je ne dormirai probablement pas... Je vais te faire la conversation.
Malheureusement, ma grimace mentale a dû transparaître dans mon regard. Je voulais juste dormir... Mais il parlait... Il monologuait... À un moment, au moment où il a senti que j'allais sombrer, il a tiré le bras vers son manteau et il y a sorti un livre de poche tout rogné:
- Tu vas pas dormir là?
- T'inquiète...
- Je ne te crois pas...
- Tu fais bien...
Et il a pris une page au hasard (ce que je vais faire à l'instant parce que je ne me souviens pas très exactement de celle sur laquelle il était tombé) et me tient à peu près ce langage:
J'ai ronronné et supplié "Encoooooooooore!" Et il a poursuivi sans se faire prier.
J'ai dormi en pointillé. Pas d'ennuie! De fatigue... Et lorsque j'émergeais au raclement de sa voix nocturne, je mentais effrontément "Non! Je ne dormais pas! Continue! "
Au petit matin, j'ai entendu la boucle de sa ceinture raclé le sol. Il partait! Il faisait déjà clair.
- Le métro est sans doute ouvert...
- (Moue boudeuse)
- Dis moi sans rire que tu ne l'avais jamais lu...
- Dis-moi sans rire que c'est vraiment un livre que tu lis... C'est drôle, je ne t'ai jamais imaginé lire un livre..
- C'est la 3e fois que je le lis...
- (culpabilité du jugement)
Puis... Il s'appelait Frédéric. La bête pour les intimes...C'était mon amant. Il venait cogner à ma porte tard le soir. Parfois je dormais déjà. Il empruntait la camionnette de ses parents, la stationnait en arrière, escaladait l'escalier de métal qui menait à une porte dans ma chambre. Il repartait généralement quelques heures après, je m'étais généralement rendormie. C'était un type un peu bourru, soudeur de métier, pleins de tattoos. Nos conversations n'étaient pas essentielles. Nous n'avions jamais investi cet aspect-là.
Un soir, il m'avait appelé du centre-ville. Sa soirée l'emmerdait et avait envie de me voir. Il était débarqué avec le dernier métro sous une pluie assassine. Après quelques temps, je me suis lovée contre lui. J'ai constaté que la pluie était aussi agressive qu'à son arrivée...
- Tu veux dormir ici? Il pleut... Et y'a plus de métro.
On ne faisait pas ça nous... On ne dormait pas ensemble. Il a hésité quelques secondes...
- Ouain... Je ne dormirai probablement pas... Je vais te faire la conversation.
Malheureusement, ma grimace mentale a dû transparaître dans mon regard. Je voulais juste dormir... Mais il parlait... Il monologuait... À un moment, au moment où il a senti que j'allais sombrer, il a tiré le bras vers son manteau et il y a sorti un livre de poche tout rogné:
- Tu vas pas dormir là?
- T'inquiète...
- Je ne te crois pas...
- Tu fais bien...
Et il a pris une page au hasard (ce que je vais faire à l'instant parce que je ne me souviens pas très exactement de celle sur laquelle il était tombé) et me tient à peu près ce langage:
Incroyable... Ce livre était dans ma bibliothèque et je n'avais jamais pensé le lire...« — Vous êtes marié ?L’eau sucrée chante dans la cafetière de cuivre.— Non.J’y verse trois cuillerées de café moulu turc, et je tourne lentement jusqu’à ce que ça prenne le velouté de la voix de Clara.— Les enfants en bas ?Puis je repose le tout sur le feu et fais monter en prenant soin de ne pas laisser bouillir le café.— Demi-frères et demi-sœurs, ce sont les enfants de ma mère.Le temps de laisser son petit crayon noircir son petit carnet, l’inspecteur Caregga lâche la question suivante :— Et les pères ?— Eparpillés.Je jette un coup d’œil par la porte de la cuisine, Caregga écrit avec application que ma pauvre mère éparpille les hommes. Puis je fais mon apparition, cafetière et tasses à la main. Je verse le jus épais. »Extrait de: Daniel Pennac. « Au bonheur des ogres. » iBooks. "
J'ai ronronné et supplié "Encoooooooooore!" Et il a poursuivi sans se faire prier.
J'ai dormi en pointillé. Pas d'ennuie! De fatigue... Et lorsque j'émergeais au raclement de sa voix nocturne, je mentais effrontément "Non! Je ne dormais pas! Continue! "
Au petit matin, j'ai entendu la boucle de sa ceinture raclé le sol. Il partait! Il faisait déjà clair.
- Le métro est sans doute ouvert...
- (Moue boudeuse)
- Dis moi sans rire que tu ne l'avais jamais lu...
- Dis-moi sans rire que c'est vraiment un livre que tu lis... C'est drôle, je ne t'ai jamais imaginé lire un livre..
- C'est la 3e fois que je le lis...
- (culpabilité du jugement)
* * *
Cette nuit-là, je suis tombée amoureuse... Pas de celui que vous pensez. Dw l'un est né une amitié sincère et je suis tombée amoureuse d'une famille un peu tordue où toutes les conventions étaient tarabiscotées.
J'ai délaissé mes lectures universitaires pour tomber dans une obsession littéraire incroyable. J'ai enfilé Au Bonheur des ogres, la Fée Carabine, la petite Marchande de prose et Monsieur Malaussène en un temps record... Puis rien... Il n'y avait plus rien à lire... Puis j'ai recommencé. Je les ai tous relu. J'en ai préparé une présentation universitaire...
Et Bing! 1999! Opportunité incroyable d'aller faire un voyage à Paris. Tout un mois à me balader partout dans la ville au gré de mes envies... Et au coeur de mes recherches... Belleville...
Belleville, c'est le quartier de Pennac, l'auteur des aventures des Malaussène, mais c'est aussi, en partie, la scène de la vie de cette famille singulière.
Je tenais à y aller... Tellement. Mais qui m'accompagnait dans mes virées, contournait systématiquement. Puis, j'ai pris mon courage à deux mains et j'y suis allée toute seule. Ce qui avait alors donné un billet échevelé écrit avec le même essoufflement que m'avait offert l'expérience.
Je lisais pendant ce voyage Aux fruits de la Passion histoire de la naissance de la fille de Thérèse. Dernier roman original que j'ai lu...
Ensuite, la vie continue... J'y repensais souvent... Comme on pense à un vieille amant qu'on regrette... Si on n'avait pas flanché par une nuit pluvieuse d'automne, on aurait encore ce plaisir de redécouvrir nos premiers émois?
Et hiver 2017, 18 ans plus tard... Les Malaussène refont surface... Ils nous traînent dans les souvenirs, dans les émois, dans les souvenirs... Je plonge même si je sais que parfois, vaut mieux laisser nos souvenirs où ils étaient...
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